Rien de plus simple que d’ouvrir une boîte noire, même si elle n’est pas uniquement scellée, comme elle doit l’être, mais aussi conférée dans du béton et dans un coffret à triple blindage et une triple serrure avec un chiffre d’abord puis pas moins de triples clefs aussi. Si l’on veut, on y parvient. Mais pourquoi faire ? 

Une fois son contenu tenu pour secret libéré, comment on accompagne sa diffusion. Qui lui donnera une direction ou plusieurs à la fois pour se disperser par la cheminée dans les foyers des destinataires potentiels. “Sortir le religieux de sa boîte noire”, tel est le titre d’un livre (Genève, Labor et Fides, 2019, 223 p.) qui attire mon œil lors de la consultation du bagage théologique d’un certain Pierre Gisel, dont le nom ne vous dit sans doute rien.

 

C’est à l’occasion d’une préparation au mariage de ces dernières semaines que son nom fut évoqué ; en voyant le nom du fiancé je lance : j’ai rencontré un certain Pierre Gisel à Lausanne lors d’un colloque sur la théologie de religions. C’est mon oncle, j’entends au retour. Je raconte mes souvenirs que j’ai envie de réactiver, dépasser même, d’où ce podcast. 

Sur l’internet, je trouve l’article de Danièle Hervieu-Léger p. 216-218 https://doi.org/10.4000/assr.57647, une recension qui me suffit pour développer l’histoire de la boîte noire, pour le livre ce sera peut-être une autre fois.

 

Tout d’abord je me réfère à ma boîte noire, celle de l’appareil photo de mon école primaire du podcast d’il y a peu. Celle de Pierre Gisel éveille la même curiosité, mais plus forte est la charge d’un contenu et plus complexe qu’un cliché sur la religion ou ses représentants, chargé du noir à souhait.

Puisque sur un cliché, pour que l’image soit lisible, celle-ci doit être révélée à la lumière, par la lumière, dans la lumière, avec une torche, lampe, ampoule… Aussi noire soit-elle, la boîte contient aussi de la lumière dont les yeux avides des spectateurs tout aussi curieux qu’attentifs vont être éblouis, presque aveuglés, c’est le privilège de l’innocence du premier contact, plus tard lorsque les yeux vont s’y habituer, ce sera tout autrement. 

 

Inscrire dans le temps relativement long l’investigation avec ses « va et vient » entre la boite et le regard qui y est posé, c’est accepter de ne pas tout comprendre, ni au début ni même à la fin, et si moi-même, je vous ai perdu en route dans ce podcast qui suppose aussi une certaine durée d’investigation, la remarque sur la boîte noire vaut aussi pour ici.

 

La recension contient des questions et des explications que l’on est en droit d’attendre.

 

« « Sortir le religieux de sa boîte noire » ou « Ouvrir la boîte noire du religieux » ?

En dépit de la note explicative fournie par l’auteur (p. 11), le titre de cet ouvrage pourrait, à lire vite, prêter à malentendu.

La formule suggérant d’extraire le religieux d’un enfermement où il serait tenu, et par là rendu inintelligible, dirige spontanément le regard critique du côté des systématisations théologico-dogmatiques mises en œuvre au sein des institutions religieuses, du côté des détournements politiques dont ces constructions font l’objet, mais aussi du côté des réductions explicatives avancées par les sciences sociales et mises à contribution dans un débat public appauvri. »

 

La question est posée, comment appréhender la réalité dans sa complexité.

On ne pourra jamais éviter les simplifications appauvrissant le contenu réel. Sortir ou ouvrir, la différence est dans le but recherché.

S’agit-il non seulement d’ouvrir mais aussi de sortir ?

Dans le premier cas, l’ouverture permet seulement de voir à l’intérieur de la boîte, en observant de quoi elle est faite et comment son contenu se propage dehors, sans jamais s’évaporer et disparaître totalement dans la nature. Alors que dans la sortie, il y a un mouvement de déplacement, une volonté d’en finir avec l’état dans lequel ce contenu se trouve dans la boîte. Quitte à le mettre dans une autre, celle de l’idéologie ambiante, dont la domination ne supporte aucune faille à la subordination.

 

Pour le moment, j’arrête là la citation de la sociologue de religions qui, comme l’auteur qu’elle recense, sait mettre des mots précis (à défaut d’être simples) sur les réalités complexes, car difficilement saisissables dans leur interconnectivité dont elles sont dépendantes, et ou de plus, tout bouge tout le temps, c’est comme opérer un cardiaque à cœur ouvert. Heureusement que tout bouge, car il s’agit d’ausculter la vie sociale sous le prisme de la présence du religieux que l’on a souvent associé aux religions établies, alors que de plus en plus souvent, il s’agit des personnes qui sont porteuses de tels symptômes de façon individuelle. 

 

Le mouvement de sortie de la religion qui a pris ses marques de façon bien établie dans la société moderne depuis déjà si longtemps (depuis toujours ?) constitue une première étape de l’évolution qui aux contours arrondis du globe terrestre ne semble que progresser dans certains endroits plus que dans d’autres. L’étape suivante est celle du mouvement inverse, déjà bien entamé, surtout et pour cause dans les pays et sociétés qui s’estiment en être enfin libérées. Elles s’estiment telles, car n’est pas encore soldé le passif des contentieux. Qui s’estiment déjà libérés du carcan imposé par les religions établies ou sont en passe d’y parvenir. Libérées de la servitude à l’autre, le religieux (sentiments et actions) a du mal à se frayer un chemin de liberté dans le magma sociétal qui le happe et le digère. Et quand certaines manifestations du religieux sont indigestes on les ingurgite vite, à la hâte (le gavage), quitte à les rendre à coup de vomi qui servent de purge.

 

Une fois le religieux sorti de la religion, et ce en dépit des aléas du religieux à l’intérieur des religions établies, il semble préférable, car plus efficace, de le faire entrer dans la société en direct, et non pas par l’intermédiaire des structures religieuses nouvelles comme système à intégrer, suivre et en tenir compte. Mais de façon nouvelle, justement émiettée, et à ce titre incontrôlable, car accueilli uniquement à partir de besoins personnels d’une vie concrète. Même si le religieux, présent à l’intérieur des religions établies et sous leur contrôle, est aussi soumis aux intérêts individuels, mais ceux-ci sont régulés collectivement ou plutôt autoritairement, ce qui pour certains est rassurant, alors que pour beaucoup d’autres étouffant leur propre liberté de croire et d’agir. 

 

Or, ce sont eux qui ont gain de cause, chacun pour sa part, individuellement.

Il reste maintenant à consolider de tels acquis, la tâche qu’ils s’emploient à accomplir aussi chacun dans sa singularité, donc sans s’organiser, car ceci n’est absolument pas nécessaire, voire dangereux pour la liberté individuelle. La consolidation des acquis, obtenus individuellement mais en présence des autres qui pensent pareil, se fait à la suite d’une sorte d’osmose que la nature dote, gratifie ceux qui pensent pareil. Les amoureux ne sont-ils pas dans ce stream, et toute la démarche spirituelle dans les religions dites transcendantes n’a-t-elle pas cette unité de pensée et d’action (que ta volonté soit faite). 

 

Ici ils n’ont même pas besoin de vérifier pour savoir ce que les autres pensent et s’ils font pareil. C’est certain, puisque leurs pensées sont à la base de leurs actions exercées individuellement, mais au nom de mêmes ressentis sur ce que doit être une religion, ce qui se constate aisément. La cristallisation de tels propos facilités par les vedettes du “show business” n’est pas une invention de quelques-uns, ça parle au cœur, tout comme tout ce qui concerne les relations affectives dont l’affect est justement exploité à souhait. Et devenant le vecteur de la libération, cet affect affecte tout raisonnement plus ou moins libérable de son influence.

Dans ce contexte, quelle est alors la différence non seulement entre ouvrir la boite noire et sortir le religieux de sa boite noire, mais aussi entre ouvrir la boite noire du christianisme et l’extirper du trou noir ?

La métaphore de la boîte noire fait sens, celle du trou noir, bien plus ambiguë, le fait aussi. Mais la boîte noire, ce n’est ni un coffre-fort ni un tabernacle. 

 

La Boite noire « est un dispositif dynamique dans lequel s’enregistre, dans le temps et dans l’espace, le processus constitutif des relations entre les religions et le social. » Donc ce n’est pas le graal à chercher et surtout à trouver, ni d’un autre trésor caché, comme celui des Templiers (le nouveau film sur le Comte de Monte Cristo, mériterait un développement en soi), ou encore y trouver une idée géniale de présenter les dogmes considérés souvent comme des étouffe-chrétiens (cette expression, je la tiens de la bouche d’une cheftaine au sujet d’un gâteau que l’on pouvait avoir à manger dans le camps scout). Mais s’attacher aux détails que les généralisations gomment et les yeux finissent par ne plus les percevoir, même deviner. Pas de noyau dur improbable qui serait en train de cristalliser l’essence du religieux ou du sacré, plutôt l’expression  diffuse des nouvelles spiritualités centrées sur l’individu et ses affects. 

 

En usant d’une métaphore pour décrire ce dont parle la recension, on peut dire que l’homme moderne (et la femme aussi) ont encore tellement dans les oreilles les paroles du chant religieux que l’homme est une histoire sacrée, qu’ils ont pris cela au mot et continuent à l’affirmer, quitte à trouver une référence à la source bien allégée (la nature et ses alliés que sont la conviction et les moyens de la réaliser), bien plus facile d’accès, plus convenable aussi par les temps qui courent. Sans Dieu, à la place de Dieu avec les sentiments dont le Dieu monothéiste était considéré comme sûrement dépourvu, car ceux-ci considérés comme des faiblesses dignes des femmes, d’enfants et de certains hommes, ceux qui n’arrivent pas à s’en retenir en les faisant échapper à coup de défoulements pour faire porter aux autres ce qu’ils finalement arborent. 

 

Autrement dit, surtout plus sérieusement, il s’agit « d’élucider la manière dont le religieux prend corps, sous des formes à chaque fois spécifiques, dans ce que Troeltsch (1865-1923) désignait en son temps comme « la synthèse culturelle du présent »».

Son œuvre propose une réflexion sur la modernité comme lieu de tensions entre la tradition (l’« absoluté » du religieux) et l’éclatement des valeurs diagnostiqué par le relativisme historique qui caractérise alors les sciences sociales (historiques) en plein essor. Décidément, les éclatements de valeurs et l’individualisation de l’approche du religieux qui en résulte ne datent pas d’aujourd’hui. Cette synthèse culturelle du présent concerne toutes les composantes sociales : politique, scientifique, esthétique, économique, morale, religieuse etc. 

 

A mon avis, toutes ses composantes se présentent individuellement, chacune dans sa propre structure, mais souvent en partenariat avec des connivences différenciées sous forme de narrations qui les lient au présent pour pouvoir en faire une synthèse culturelle. Si l’ancien président François Hollande est connu pour être l’homme de la synthèse, cela étant révélateur du besoin de reprendre des éléments épars d’un débat etc. Rien d’étonnant à ce que le religieux ne fasse pas pareil au cours d’un processus d’émancipation avec l’entrée dans la phase suivante, ou alors y être déjà, en changeant de support. 

 

Le religieux (sentiment et action ritualisée) est constaté dans les narrations individuelles, dans la première et dans la seconde étape, mais comme nous l’avons souligné, ces narrations sont compatibles entre elles. Solidaires de toutes les autres, car formulées sur le même registre, celui de l’autonomie individuelle (comme autrefois elles étaient solidaires de la loi d’appartenance).  

 

Comme pour des grains de sable qui forment une belle plage où ils glissent sous forme d’une carrière, jusqu’à quand faudrait-il attendre pour constater leur utilité par des plagistes ou par la bétonneuse, car tôt ou tard une connivence se présentera sous forme justement de la synthèse culturelle du présent qui opère tout le temps et en toutes circonstances, et qui va aussi agir dans le sens de la métaphore. 

 

Nous y voilà dans une réincarnation du religieux qui prend corps différemment par rapport au passé, sans pour autant préjuger de sa forme dans l’avenir.

Le religieux s’incarne dans les individus et cela va bien plus loin qu’en se dotant d’un système de purification du corps et de l’esprit en vue d’une aisance et d’une efficacité combinées au profit en terme du bonheur, ou encore garder quelques relents des rituels superstitieux. Cette persistance du religieux, on la constate dans le fait d’éprouver la présence d’un tout qui dépasse et englobe, qui englobe et dépasse, sans vraiment chercher une priorité ontologique dans l’apparition de l’un et de l’autre constat au sein de la conscience. 

 

Pour présenter la réalité sociale dans sa multiplicité mouvante, en y enregistrant des interactivités diverses dont le fait religieux est à la fois l’agent agissant et l’objet d’action de la part des autres, Pierre Gisel se concentre aussi sur l’analyse des apories contemporaines de la modernité – « aspirations sans limites à la croissance, à la consommation et à la jouissance immédiate, standardisation uniformisante destructrice de la responsabilité personnelle et de la capacité critique, addictions multiples témoignant de la dénaturation individualiste de la conquête moderne de l’autonomie du sujet – qui offrent un nouvel espace de déploiement aux deux fonctions constitutives de la religion : la symbolisation du temps et de l’espace d’une part ; l’ouverture de l’humain vers un excès qui le dépasse d’autre part. »  

 

Comme nous l’avons vu, l’excès qui dépasse l’humain contient des traces du religieux. Mais il y a plus, la symbolisation du temps et de l’espace n’est rien d’autre que la visibilité des cloches d’église et les sonorités des angelus, présence des croix dans les espaces publiques (à défaut, les autres religions s’en chargent, « fusse de religions laïques », de leurs symboles). Par un accord tacite, où les espaces privés en sont dépourvus aussi (et surtout), est communément partagée la propension à ne pas s’y exposer dans les salons où on accueille des convives pour une soirée charmante et pleine de renseignements utiles, glanés au fil des échanges décousus. 

 

Le réflexe religieux reste bien présent dans le comportement humain, il n’a pas disparu, mais il se désolidarise de la Transcendance comme puissance référentielle sous les ailes de laquelle peuvent s’abriter tous ceux qui lui font confiance. Tels immenses glaciers se fondant dans la mer, la superbe de la Transcendance érigée en statue de tutorat à vie tombe du haut de son ciel et se confond avec la vie individuelle que chacun mène sur terre et souvent sous terre, et de plus en plus souvent dans les airs, comme il croit l’entendre, en jouissant d’une toute petite marge de manœuvre pour préserver sa liberté, tout au moins ce qu’il sent comme étant la sienne qui est à protéger à tout prix. La conquête moderne de l’autonomie du sujet n’est toujours pas parachevée, accomplie, la complexification des exigences administratives parce que juridique, donne le ton à la vie sociale dont les individus traqués pour le bonheur de la collectivité en sont ligotés.

 

Par de telles approches du religieux, avec la Transcendance est démolie toute velléité de vouloir conserver une tradition comme facteur mobilisant la construction d’un toit commun pour s’y mettre à l’abri. Dénouer les intrications entre le religieux et le politique peut s’avérer bénéfique, « dont la mise en lumière oblige à remettre en chantier les diverses réécritures, trop tôt stabilisées, du paradigme classique de la sécularisation ». Autrement dit, si possible de façon plus concrète. Devoir se résigner à, d’un côté, ne pas pouvoir se passer du religieux (vox populi, vox dei), aucune démocratie qui se respecte ne pourra le nier ni l’interdire. De l’autre côté, cela suppose devoir revoir la copie qui contient la narration républicaine sur la sécularisation, tout comme celle que les religions tiennent comme justificatifs en bon et due forme, lu et approuvé par la magistrature de la majesté céleste. En bon Suisse, Gisel ne va peut-être pas spécifier la référence à la sécularisation à la française (il en a fait à d’autres moments), mais puisque celle-ci constitue la matrice pour toutes les autres dans le monde, cela vaut surtout pour elle, et par ricochets partout ailleurs.

 

Les affirmations contemporaines du religieux, dans la société occidentale tout au moins, « marquent – en creux et le plus souvent à faux – quelque chose d’une exigence irréductible de l’humain, qui concerne, à travers l’impératif d’une confrontation à l’altérité, la construction narrative du sens qu’il se donne à lui-même. »

La précaution langagière pour décrire le religieux comme « quelque chose d’exigence irréductible de l’humain » atteste la volatilité de la matière, de la consistance du religieux.

 

Et pourtant, si ce constat ne constitue pas la matière pour le travail de l’Éducation nationale, il faudrait chercher à comprendre les fondations réelles de la démocratie à la française. La même remarque porte sur l’anthropologie chrétienne (pour ne parler que de celle-ci) qui n’a pas encore livré tous ses secrets et libéré toute sa puissance. 

 

Et dans la perspective de l’horizontalisation du religieux qui se meut en circuit fermé (selon le principe de tornado), il est naturel de constater que la Transcendance n’est repérable et ne se constate que dans la contingence historique. Avec, si l’on ne prend pas garde, le risque d’horizontaliser le religieux dans son ensemble, pas seulement au détriment de la Transcendance « transcendantale », mais aussi au détriment de toute vie sociale marquée par des relents du religieux qui peuvent s’y nicher. 

 

Et c’est alors que l’on peut, sans le vouloir ni désirer, prêter le flanc à des ambitions totalitaristes. Les civilisations anciennes avaient l’avantage sur la nôtre de ne pas avoir séparé le politique du religieux, alors que nous sommes obligés de le faire, sans regret, car cela permettra de poser un regard plus serein sur la place du religieux dans la société. 

 

Ce qui suppose de regarder de près les narrations de l’un et de l’autre, l’instance critique ainsi conviée devient un outil indispensable, mais à double tranchant. Sans regret donc, pourtant avec le risque de devoir abandonner les clarifications nécessaires pour la meilleure compréhension de la « nouvelle » place du religieux dans la société, et ceci sous pression d’autodéfense de l’un ou de l’autre, parfois sans qu’ils soient nécessairement de mèche en même temps.

C’est ainsi qu’était reçue la condamnation par Vatican de l’insurrection des Polonais en 1831 contre la Russie, ou actuellement à l’égard de la guerre en Ukraine. C’est aussi pour cette raison, semble-t-il que le processus de béatification de Mgr Wyszynski (qui avec une vision assez différente de la Ostpolitik du Vatican) fut retardé. Vous êtes dans le monde mais vous n’êtes pas du monde. Un autre monde c’est bien plus qu’une maison à soi, c’est une communauté de vie en connaissance de cause de la place de chacun.

 

« Comment faire droit à ce « travail de l’hétérogène » (Vincent Delecroix), seul susceptible de neutraliser le rêve de fusion et d’homogénéisation qui hante l’aspiration communautaire en faisant de l’union sa propre fin, au prix de l’élimination de toutes formes d’affirmations dissidentes de singularités personnelles ? La réponse à ces questions n’impose pas seulement une relecture critique de la trajectoire historique du christianisme. Elle appelle une révolution de la pensée même du religieux, mais aussi du social et du politique : […] P. Gisel interroge, en théologien, les conditions de possibilité d’une sortie de la matrice communautaire et de la machinerie universalisante avec laquelle elle a partie liée, en vue de penser la constitution du lien social à partir de la mise en relation de singularités et de différences, elles-mêmes appelées à un questionnement réflexif permanent. »

Donc les relations à nouer à partir de l’individu et non pas à partir de la collectivité religieusement (ou politiquement) justifiée.

Long est encore le chemin qui mène vers l’émancipation de l’individu de toute forme de formalisme gommant sa singularité. Est-ce que pour cette vie, un peu, on fait ce que l’on peut. Pour le reste on verra, lorsque le temps viendra pour lui faire son adieu, et voir de l’autre côté de la vie.  

 

Le mythe de la déesse Pandore parle d’une autre boîte noire, mais pas si éloignée de celle que l’on considère dans la religion en général. Par la jalousie de Zeus et à sa demande, Pandore déverse tout le venin et libère d’autres espèces vivantes symboliquement destinées à nuire à quelque chose à faire avec la boîte noire. Selon Hésiode, lorsque Prométhée vola le feu du ciel, Zeus, le roi des dieux, se vengea en présentant Pandore au frère de Prométhée, Épiméthée. Pandore ouvrit une jarre laissée à sa garde contenant la maladie, la mort et de nombreux autres maux non spécifiés qui furent ensuite libérés dans le monde.

 

Comment résumer ?

Si je me suis penché sur les différentes boîtes noires, c’est une fois entraîné par Pierre Gisel, mais par l’intermédiaire de Danièle Hervieu-Léger, à la recherche de la place du religieux dans la société actuelle. 

Par le simple fait de rendre obsolètes les structures et les contenus qui les remplissent, la sortie du religieux de la religion n’est pas synonyme de sa disparition.

Le remplacement de la transcendance par une complétude universalisante de l’humain conduit d’une dépendance à une autre.

A chacun sa liberté et ses esclavages.

Et moi, je m’endors juste à côté de la boîte de pandore en la priant de ne pas me chatouiller trop souvent. Quant à la boîte noire, elle sera ouverte une fois le navire la portant abîmé en mer. Et alors l’univers enverra son dernier signal : Ici la terre, à vous le ciel !