Alors que l’Ukraine rentre dans sa deuxième année de conflit contre l’envahisseur russe, nous allons à la rencontre de ceux qui tentent de maintenir un semblant de normalité dans la capitale martyre. Aujourd’hui, nous vous proposons de partager le quotidien d’une Française, Emily Vermersch, qui a décidé d’assumer la direction du Lycée français de Kiev depuis la rentrée scolaire, en septembre 2022.
Lycée Anne de Kiev
Le lycée français Anne de Kiev (nommé ainsi depuis 2010 – anciennement Petite école de Kiev, École française de Kiev puis Collège français Anne de Kiev après 2005) est la seule école française homologuée par les ministères de l’Éducation nationale de France et d’Ukraine et conventionnée avec l’AEFE.
L’établissement a été créé en 1994 à l’initiative de parents d’élèves et de l’Ambassade de France en Ukraine. En 2005, elle devient un collège et en 2010 un lycée. L’établissement compte en 2020 environ 453 élèves de 21 nationalités différentes. Les plus jeunes sont en petite section de maternelle, les plus âgés en classe de terminale. L’établissement est séparé en trois sites, tous se trouvant à Kiev.
Le lycée porte le nom de la reine Anne de Kiev, fille de Iaroslav le Sage, grand-prince de Kiev, et épouse de Henri Ier, roi des Francs, reine des Francs de 1051 à 1060.
Une dynamique frappée par la guerre
Quand Emily Vermersch postule pour le poste de directrice du Lycée français de Kiev, le pays n’est pas en guerre et l’établissement est confronté à une problématique liée à sa croissance. Il manque d’espace, Emily Vermersch devait avoir la mission d’augmenter la capacité d’accueil tout en assurant aux élèves l’accès aux technologies et aux matériels nécessaires à la réussite de la mission pédagogique du groupement scolaire.
Mais voilà, la politique internationale a rattrapé les projets de croissance du Lycée Anne de Kiev et a contraint l’établissement à mettre ses projets sur pause. Aujourd’hui, il n’y a plus que 64 élèves inscrits de la maternelle à la terminale et 24 professeurs en activité en allant du temps plein à une intervention de 2/3 heures par semaine.
Pour autant, cela n’a pas démotivé la candidate, bien au contraire, sa seule exigence : “avoir la garantie d’avoir les moyens pour réaliser les objectifs pédagogiques“. Pour autant, la situation sur le terrain a amené Emily Vermersch à remodeler son nouveau projet d’expatriation. A l’origine sa famille devait l’accompagner, mais par sécurité, c’est seule qu’elle est partie relever ce défi. Pour autant, son fils suit le parcours de sa mère, inscrit au Lycée français de Kiev, il suit les cours en distanciel depuis la France.
Une préparation spécifique
Si l’éloignement de sa famille est la première des contraintes à laquelle est soumise Emily Vermersch, elle a dû suivre une formation bien éloignée des standards qu’on peut rencontrer en France.
Ainsi pendant 6 mois, elle a dû se préparer à être confrontée à un environnement hostile. Elle a donc rejoint les diplomates dans un stage dit de préparation au départ à un poste sensible. Pour cela, elle est passée par un camp d’entraînement militaire dans lequel elle a pris rapidement ses marques puisqu’elle avait déjà exercé dans un lycée militaire et avait donc déjà été sensibilisée aux problématiques sécuritaires. D’ailleurs, elle n’est pas la seule à avoir dû adapter ses compétences, tout le personnel a ainsi reçu une formation aux premiers secours. Ce qui pourrait être utile si l’établissement scolaire était frappé par un missile ou un obus.
Précisons que l’établissement a été adapté avec la création d’un espace sécurisé en sous-sol que d’ailleurs la sénatrice des Français de l’étranger et présidente de l’Assemblée des parlementaires de l’OTAN a pu découvrir en compagnie des enfants lors de sa visite sur place qui fut ponctuée par une alerte. Ces abris sont homologués par les autorités ukrainiennes et pour leur réalisation l’AEFE a débloqué un budget important.
Apprendre face à la guerre ?
Si le personnel est formé et que les conditions matérielles sont optimales dans ce cadre, se pose la question de la capacité d’apprentissage dans un environnement stressant et par essence instable.
Pour maintenir un cadre pédagogique malgré cet “environnement contraint“, l’établissement fonctionne en mode hybride avec une partie des élèves en présentiel et l’autre en distanciel.
Cependant la sécurité reste l’obsession première, tout le monde connait les protocoles.
Sécurité et pédagogie au final permettent de créer une “bulle d’oxygène” où les enfants se socialisent, apprennent, une parenthèse de normalité au milieu de la barbarie. Bravo à eux !