Avec Philippe Crevel, économiste français, spécialiste des questions macroéconomiques. Fondateur de la société d’études et de stratégies économiques, Lorello Ecodata, la rédaction du site lesfrancais.press vous a proposé tout au long de l’année des articles décryptant les phénomènes économiques dans le monde. Pour conclure cette année, nous vous proposons un petit récapitulatif des faits marquants en 2021.
Forte croissance
L’économie mondiale a progressé au rythme soutenu de près de 6% en 2021. Un chiffre qui contraste avec les -3% de 2020. Cette forte croissance est le fruit du soutien colossal déployé par les autorités monétaires et politiques depuis l’éclatement de la crise sanitaire. Accélérée par le déconfinement, la forte demande en biens de consommation a poussé les chaînes de production et d’approvisionnement au-delà de leurs capacités. La reprise a ainsi subi quelques à-coups durant l’année au gré des goulets d’étranglement, des hausses des prix de l’énergie et, bien sûr, de la pandémie. De la résolution de ces problématiques dépendra la vigueur de la croissance en 2022.
Retour de l’inflation
Longtemps qualifiée de temporaire, l’inflation a d’abord été limitée aux États-Unis avant de s’étendre. En octobre, le taux annuel atteignait 6,2% outre-Atlantique et 4,1% dans la zone euro où, un an auparavant, il s’arrêtait à 0,3%. Le réveil brutal de l’activité, les problèmes d’approvisionnement, la hausse des prix de l’énergie et plus globalement des matières premières expliquent ce retour tonitruant d’un phénomène qui avait disparu des radars au 21e siècle. Si le président de la Réserve fédérale (Fed), Jerome Powell a finalement supprimé le terme de temporaire de son discours en novembre, la question demeure de savoir quelle part du renchérissement persistera en 2022.
Soutiens colossaux
Les principales économies de la planète n’auraient pu retrouver leur niveau d’activité d’avant-crise en un temps si court, si elles n’avaient pas bénéficié de mesures de soutien exceptionnelles. Les autorités politiques et monétaires ont ainsi dépensé plus d’USD 32 000 milliards entre les printemps 2020 et 2021. À elles seules, les principales banques centrales ont versé durant cette période USD 850 millions par heure dans l’économie mondiale. Si les plans politiques ne sont pas encore tous concrétisés et vont encore produire leurs effets ces prochaines années, les politiques monétaires sont, elles, sur la voie de la normalisation. La dynamique n’est cependant pas la même des deux côtés de l’Atlantique. La Fed a, en effet, une longueur d’avance en raison d’une croissance plus solide et d’une inflation plus forte. Et si la question d’une hausse des taux demeure lointaine en Europe, elle pourrait bien se réaliser en 2022 déjà aux États-Unis.
Marchés records
Dans cet environnement, l’évolution des marchés a pris, peu ou prou, des allures de cas d’école. Soutenues par la croissance et les plans de relance, les actions ont fortement progressé – approchant +20% –, avant d’évoluer plus irrégulièrement, comme attendu, en deuxième partie d’année. Mais d’autres classes d’actifs ont également occupé le devant de la scène, à commencer par les matières premières qui ont, elles, bénéficié du rebond de l’activité et des prix à la consommation. A contrario, les tensions sur les taux longs ont nui à la performance des obligations ou encore de l’immobilier coté.
Et 2022 ?
Les bonnes performances économiques devraient se maintenir en 2022, avec une croissance d’environ 4 % tant aux États-Unis que dans la zone euro. Et pourtant, chacun a le sentiment que la période actuelle n’est que le début d’un monde nouveau dans lequel la pandémie a changé la donne. Nous pensons que l’ensemble des économies développées devraient retrouver leurs niveaux de production pré-pandémiques d’ici la fin de l’an prochain, tandis que certains marchés émergents et pays en développement continueront d’enregistrer des pertes de production. En outre, la croissance de l’emploi devrait afficher un temps de retard sur la reprise de la production. En effet, les économistes s’attendent à ce que l’emploi global ne retrouve que les deux tiers de son niveau pré-pandémie, en raison notamment des craintes sanitaires persistantes et de l’adoption accélérée de l’automatisation.